Les défis du matériau papier-carton

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À l’heure de la recherche d’alternatives aux emballages en plastique à usage unique, le papier-carton a la cote. Industriels et fabricants capitalisent sur ses qualités - renouvelable, recyclable, biodégradable - pour développer des solutions d’emballages circulaires qui tendent vers le mono-matériau. Les solutions actuelles répondent-elles à toutes les fonctions d’emballages attendues sans déstabiliser le recyclage ? Quelles sont les perspectives pour toujours mieux le recycler ? On fait le point sur les défis que doit encore relever le papier-carton, pour plus de circularité.

Pourquoi le papier-carton séduit-il autant ?

Il plaît aux industriels pour ses performances mécaniques, parce qu’il sait à la fois être léger et facile à mettre en œuvre. Par ailleurs, il plaît pour son origine renouvelable, son imprimabilité et sa recyclabilité. Il plaît aussi aux consommateurs car il bénéficie d’une image positive de matériau d’origine végétale, moins transformé.

Au premier regard, c’est en effet un matériau idéal capable d’assurer les principales fonctions attendues d’un emballage : il transporte, protège, permet la consommation et l’information. Mais il a ses limites. Trop perméable, il présente de faibles propriétés barrières à l’eau, aux graisses et au gaz, pourtant indispensables au conditionnement de nombreux produits, en particulier alimentaires.

Comment le papier-carton évolue-t-il pour concevoir des emballages efficaces ?

Pour pouvoir conditionner des produits liquides, de la viande ou des produits lourds, le papier-carton améliore ses propriétés barrières via différentes technologies. Notamment en apposant à sa surface un autre matériau ou une autre substance. Pour ce faire, il existe aujourd’hui 3 grands types de méthodes :

  • Dépose d'un film plastique (PE, PP ou autre) ou aluminium, ou parfois les deux, par lamination ;
  • Extrusion* d’un thermoplastique ;
  • Enduction** d’une couche de composition qui varie en fonction de la barrière souhaitée.

Pour rester un emballage en papier-carton, l’emballage doit être constitué d’au moins 50% en poids de papier-carton. Néanmoins, associé à un autre matériau et multicouche, l’emballage se « complexifie » : le matériau associé qui recouvre l’intégralité d’au moins une de ses faces (intérieure ou extérieure) est indissociable du papier-carton. L’emballage reste recyclable mais doit l’être dans des usines spécialisées. C’est ce que l’on appelle un emballage en papier-carton complexé. Lorsqu’il est recyclé, c'est essentiellement sa part papier-carton qui est alors recyclée. Les matériaux associés sont généralement valorisés en énergie.

* : Fabrication de produits par écoulement de matières liquides (spécialement matières plastiques).
** : Action d'enduire la surface d'un textile d'une couche protectrice pour en modifier l'aspect ou lui conférer des qualités particulières.

Est-ce une nouveauté en matière d’emballages ? 

Oui et non. On en connait déjà un certain nombre, et de longue date, comme les briques ou les papiers d’enveloppage utilisés en boucherie. Mais ce qui est nouveau, c’est le déploiement de ces "complexés" sur de nouveaux secteurs : par exemple, des sachets pour la confiserie, des barquettes pour la charcuterie, des plats "traiteur" ou encore la cosmétique.
Boostés par la nécessité de trouver des alternatives aux emballages en plastique à usage unique, les papiers-cartons complexés représentent aujourd’hui environ 5% des emballages en papier-carton mis sur le marché.

Quelles sont les conséquences de l’émergence de ces papiers-cartons complexés sur le recyclage ?

C’est tout l’objet des travaux du CEREC (Comité d'Évaluation de la Recyclabilité des Emballages papier-Carton) un comité d'expertise technique créé en 2007 par Citeo et Revipac pour les emballages ménagers en papier-carton, qui teste et analyse le marché pour voir ce qui sera effectivement repris pour recyclage et ce qui ne peut pas être recyclé. 

En lien avec le COCET, qui s’attache à analyser le parcours des emballages en centre de tri pour relever les problématiques d’orientation (exemple : la métallisation rend aveugle les détecteurs IR en centre de tri), Citeo travaille ensuite à faire la somme de toutes ces connaissances, que les clients peuvent retrouver dans l’outil TREE, et s’en sert pour conseiller les industriels en matière d’emballages écoconçus.

Avec plusieurs objectifs :

  • Tout d’abord, mieux définir ce qu’est un papier-carton complexé, en définissant des seuils clairs de matériaux associés. Aujourd’hui, un emballage papier-carton est considéré comme complexé lorsque l’intégralité d’au moins une face du matériau papier-carton est recouvert d’au moins une couche d’un autre matériau indissociable (en dehors d’un process de recyclage spécialisé), ou si ces couches de matériaux associés représentent plus de 15% du poids de l’emballage.
     
  • Améliorer l’identification de ces emballages en centre de tri. Une couche plastique ou métallisée sur la face externe de l’emballage peut empêcher la bonne orientation de l’emballage en centre de tri. Des tests sont menés par Citeo et le COCET dans ces sites industriels pour préciser les recommandations et les éléments à ne pas associer au papier-carton et le CEREC travaille à l’identification des substances et traitements qui limitent son recyclage. En complément, des projets d’innovation convoquant l’intelligence artificielle ou des systèmes de tatouages numériques pourront permette d’identifier très clairement la composition des emballages. Des tests sont également en cours, comme pour le projet Holygrail (tous matériaux) à l’échelle internationale.
     
  • Garantir un bon défibrage (séparation de la fibre papier-carton des autres matériaux). Par exemple, il ne faut pas qu’une barrière à l’eau trop forte empêche ce défibrage indispensable au recyclage des fibres. Les fibres non défibrées se retrouveraient dans les rejets avec les matériaux associés. Si les rejets représentent plus de 50% du poids de l’emballage, alors il ne sera pas recyclable.
     
  • Optimiser la partie fibreuse à recycler. Lors des phases d’extrusion des couches de plastique ou d’aluminium, on peut réduire cette partie de la matière à recycler dans l’emballage final. Réduire au maximum les matériaux ou couches additionnels pour aller vers des emballages mono-matériaux, tout en conservant des fonctionnalités essentielles au produit qu’on emballage, est le principal objectif de la R&D en écoconception sur ces emballages.

Quels sont justement les projets d’écoconception en cours et avec quelles technologies ?

Nombreux sont les fabricants d’emballages et les metteurs en marché à mener des projets de R&D pour développer ces nouveaux emballages. De même, Citeo a engagé des projets avec ses partenaires clés, le Centre Technique du Papier en tête et la chaire Cellulose Valley également. Pour atteindre son principal objectif tout en comblant les attentes des différents marchés, le papier-carton doit relever 5 défis d’écoconception définis par Citeo :

  • La barrière : en devenant résistant à l’eau, au gras, à l’oxygène… pour conserver et protéger les produits. La chromatogénie - qui consiste à greffer un acide gras sur une molécule de cellulose pour qu’elle devienne une barrière à l’eau - en est un bon exemple.
  • La fermeture : pour être capable de fermer sans utiliser d’éléments susceptibles de réduire sa recyclabilité (colle, bouchons…). Voir le projet Ultracell qui permet une fermeture sans colle par agitation et montée en température des molécules de cellulose pour permettre leur liaison.
  • La forme : c’est-à-dire épouser de nouvelles formes d’emballages : bouteilles, flacons, barquettes… Voir les enseignements du projet MC2, pour le développement d’une mousse de cellulose moulée nouvelle génération, qui soit mono-matériau et barrière.
  • La transparence : pour rendre visible les produits conditionnés. Voir par exemple le projet e-bliss pour le développement d’un emballage en papier carton transparent, à faible grammage.
  • L’élasticité : pour devenir flexible, étirable, et résistant notamment pour permettre de nouvelles mises en forme d’emballages.

Pour en savoir plus sur ces projets innovants :

Pour relever les défis, les projets de R&D se focalisent sur la cellulose, la matière d’origine du matériau papier-carton. C’est cette matière végétale qui est affinée, travaillée et enrichie au travers de différents procédés pour fabriquer un papier-carton avec des propriétés barrières, sans perte de recyclabilité et si possible sans ajout de matériau associé.
Parmi les solutions déjà sur le marché, l’emballant papier transparent E-Bliss qui permet de conditionner les magazines ; et répond ainsi à l’interdiction des blisters plastiques pour le secteur de la presse.
Avec la chromatogénie, qui consiste à greffer une molécule d’acide gras sur une petite partie des molécules de cellulose qui constituent le papier-carton, un gobelet traité avec seulement 3% de plastique PVOH peut contenir des boissons chaudes, froides, même celles contenant des matières grasses comme le lait.
Une technologie de rupture permettant d’adapter le gobelet à l’usage sans dénaturer ses caractéristiques ni nuire à son recyclage. 
Son aptitude au contact alimentaire a été validée, il s’agit maintenant d’assurer son déploiement industriel. Développée également avec le Centre Technique du Papier, une barquette en cellulose moulée, barrière aux graisses.
Par ailleurs, le distributeur Auchan propose une barquette en fibre de cellulose, recyclable et compostable à domicile.

De son côté, la société Atlantic a développé un élément de calage en papier-carton pour ces chauffe-eaux volumineux avec des qualités de résistance très satisfaisantes.

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